Crise de l’eau, violences…
L’USM vous a tenus informés de la situation problématique de Mayotte (lire notre article du 14.09.2023). Les sections syndicales locales font aujourd’hui un communiqué de presse pour dénoncer la situation.
L’envoi de brigades mobiles a été ressenti par les fonctionnaires et magistrats en poste à Mamoudzou comme une amélioration de leur situation.
Malheureusement, la crise de l’eau et aujourd’hui la hausse des violences sur l’île rendent la situation inquiétante pour ne pas dire intenable. Récemment, deux collègues ont été violemment agressées alors qu’elles circulaient sur la voie publique (sans lien établi avec leur profession), démontrant ainsi les difficultés à vivre sereinement sur l’île.
La presse s’est fait l’écho de cette agression dans des termes choquants pour nos collègues puisqu’il est insinué que les magistrats, qui ne seraient pas assez sévères avec les délinquants, sont responsables de la situation. Le droit de réponse exercé par les chefs de cour a été apprécié par les collègues. Il n’est toutefois pas de nature à apporter des solutions concrètes.
Depuis fin octobre, la violence a atteint un seuil alarmant : il n’est plus possible pour les habitants de prendre la route sans risquer une atteinte à leur intégrité physique et psychique.
Les causes de cette explosion de la violence sont complexes et ne semblent pas en lien avec le seul manque d’eau. Les forces de l’ordre, en infériorité numérique, se trouvent très démunies face aux bandes.
Face à cette insécurité omniprésente, une partie de la population mahoraise réagit en imposant des blocages routiers sur plusieurs axes de Mayotte. Les travailleurs du sud de l’île ne peuvent plus se rendre à Mamoudzou et l’aéroport est inaccessible, la barge permettant de se rendre sur Petite-Terre étant à l’arrêt. On ne sait combien de temps ce mouvement va durer mais la préfecture et certaines mairies sont également bloquées.
Dans ces conditions, Mayotte se vide petit à petit de ses fonctionnaires (notamment les professeurs) et les juridictions judiciaires n’échappent pas à ce phénomène.
Un fort sous-effectif dans les mois à venir est à craindre. Le renouvellement seulement par moitié des brigades mobiles à compter de février et l’absence de candidats imposent aux collègues en poste d’assumer des charges supplémentaires. La justice sur l’île ne pourra plus fonctionner d’ici quelques mois avec les départs annoncés.
Dans ce contexte, la direction des services judiciaires (DSJ) envisage des affectations en sortie d’école au tribunal judiciaire de Mamoudzou. Or, l’affectation de sortants d’école ne peut être vue comme une solution pérenne. Contraindre les collègues qui ne le souhaitent pas à exercer à Mayotte est périlleux pour eux comme pour l’institution. Afin d’éviter cet écueil, l’USM sollicite que la liste des postes offerts aux auditeurs de justice de la promotion 2022 comporte un volant de postes. L’USM avait déjà formulé dès 2022 des propositions concrètes pour une véritable politique d’attractivité en faveur de Mayotte et de la Guyane, elle continue de porter ces mesures (lire notre courrier de janvier 2022 adressé au ministre des Outre-mer, au DSJ, à la secrétaire générale du ministère de la justice et aux chefs de la Cour de cassation en qualité de présidents du conseil d’administration de l’ENM).
Si la sécurité à Mayotte ne dépend pas de notre seul ministère, ce dernier peut néanmoins améliorer la situation des personnels judiciaires en poste sur l’île.
C’est pourquoi l’USM a demandé à la DSJ la mise en place de plusieurs mesures :
- l’affectation avec possibilité d’obtenir une mutation au bout de deux ans avec priorisation d’affectation à l’issue de ce délai (deux ans étant « la limite du supportable » selon les collègues interrogés) ; lors de notre dernière rencontre bilatérale, la DSJ nous a indiqué que les magistrats affectés à Mayotte pouvaient obtenir leur mutation au bout de deux ans (sans priorité d’affection) et au bout de trois ans avec priorité d’affectation ; or, beaucoup de collègues nous font état de leur grande difficulté à obtenir une mutation à l’issue d’un délai de deux ans ;
- le maintien en l’état des brigades mobiles avec des effectifs de fonctionnaires et magistrats suffisants ;
- une aide à l’obtention d’un logement similaire à celle des douanes ; les douanes ont un partenariat avec le bailleur social de l’ile (SIM, société immobilière de Mayotte) qui leur permet d’avoir des logements réservés ; le système mis en place par notre ministère (recours à un prestataire pour trouver des logements) est inefficace faute de logements locatifs disponibles ;
- un indemnitaire revalorisé.
Vous trouverez ici le lien vers le communiqué de presse intersyndical des unions régionales Union syndicale des magistrats et Syndicat de la magistrature de Saint Denis de la Réunion.