L’USM a pris connaissance de la circulaire interministérielle Crim-Boap n°2024-0050-H7 concernant « la reprise définitive des missions judiciaires par le ministère de la justice et la procédure exceptionnelle de recours aux forces de sécurité intérieure (FSI) » adressée aux parquets généraux et parquets ainsi que, pour information, au siège.
Nous avons notamment découvert que, s’agissant des substitutions des escortes pénitentiaires par les forces de sécurité intérieure (subsidiarité), la décision finale appartenait au préfet outre le fait que la « négociation » à cette fin serait désormais menée par l’autorité judiciaire plutôt que par l’administration pénitentiaire empêchée.
Si cette architecture peut découler d’un certain pragmatisme issu d’un principe de réalité, les FSI opposant un refus quasi-systématique aux réquisitions judiciaires, elle apparait cependant contra-legem en ce qu’elle ajoute aux textes, de nature législative et réglementaire, existants (art. 42, 51 al.3 et D. 57 du CPP).
Au surcroit cette circulaire nous semble poser difficulté en termes de séparation des pouvoirs.
L’USM a écrit dès le 4 juillet 2024 au garde des Sceaux pour en solliciter l’abrogation.
Par courriel du 5 juillet 2024, le cabinet du garde des Sceaux a tenu à nous rappeler que la fin de l’intervention des FSI en matière d’extraction judiciaire aurait dû intervenir dès 2019, délai repoussé à juin 2024, notamment pour les outre-mer et les prêts de main-forte, et que notre ministère avait eu le souci de prévoir un « process » pour le recours exceptionnel aux FSI pour certaines opérations d’extractions judiciaires. Conformément aux préconisations du rapport d’avril 2021 des inspections concernées, il a été décidé d’acter une intervention préfectorale, dans un souci de responsabilisation de chaque acteur, dont l’appréciation est limitée à la seule évaluation des possibilités matérielles des FSI et non à l’opportunité de l’acte judiciaire. Il a nous également été indiqué qu’il avait été négocié le maintien des prêts de « main-forte » et les extractions ultra-marines.
L’USM, sur autorisation de son conseil national, a chargé son avocat d’agir aux fins d’annulation de cette circulaire mais aussi en référé au regard de l’atteinte portée à la hiérarchie des normes, s’agissant d’une « circulaire réglementaire » ayant pour effet de modifier le droit positif relevant d’une norme supérieure, mais aussi au principe de séparation des pouvoirs et à l’indépendance des magistrats. En tout état de cause, cette circulaire ne règle nullement la problématique ancienne des sous-effectifs des services pénitentiaires d’extractions judiciaires, que l’USM n’a cessé de dénoncer dès l’origine. D’application immédiate, elle va soulever des difficultés majeures à brève échéance ; les FSI étant sur-employées pour les JO, la moindre défaillance de l’ARPEJ se traduira par des refus des préfets qui risquent de devoir composer avec des effectifs déjà exsangues.
La problématique est donc la suivante : faut-il renoncer à nos principes au prétexte d’un principe de réalité qui ne satisfait personne, l’Etat renonçant à se donner les moyens d’exercer une partie de ses missions régaliennes ?
Vous trouverez ici notre courrier au garde des Sceaux.