L’USM obtient l’annulation devant le Conseil d’Etat de plusieurs dispositions du décret du 13 avril 2022 pour non-respect de la hiérarchie des normes.
L’USM a introduit le 2 juin 2022 un recours devant le Conseil d’Etat à l’encontre de plusieurs dispositions du décret n°2022-546 du 13 avril 2022 portant application de diverses dispositions de procédure pénale de la loi du 22 décembre 2021 pour « la confiance dans l’institution judiciaire ».
Nous avions notamment critiqué le fait que, sous couvert de préciser des dispositions législatives – la procédure pénale étant de nature législative contrairement à la procédure civile – le pouvoir exécutif avait en réalité méconnu les dispositions légales existantes ou ajouté aux textes.
La hiérarchie des normes s’en trouvait dès lors malmenée.
Par un arrêt du 24 juillet 2024 (à lire ici), le Conseil d’Etat a largement fait droit à nos arguments et à ceux de l’AFMI (association française des magistrats instructeurs), les requêtes distinctes de nos organisations ayant été jointes, en annulant les articles 2, 6 et 10 du décret critiqué.
La haute juridiction n’a en revanche pas fait droit à notre demande de question préjudicielle à la Cour de cassation sur l’interprétation de textes de procédure pénale (3-) mais a annulé, avec effet immédiat, les dispositions concernant le dessaisissement du juge d’instruction (11-), la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (18-) et la copie de pièces pour ou par l’avocat préalablement à la mise en examen (22-).
Les attendus sont très clairs :
- concernant le dessaisissement du juge d’instruction infra pôle : « en rendant obligatoire en cours d’information, sur réquisition du procureur de la république, un dessaisissement dont l’article 118 du CPP prévoit qu’il n’est que facultatif (…) a méconnu les dispositions législatives dont il entendait préciser l’application » ;
- concernant la CRPC : « les dispositions prévues par l’article 6 du décret attaqué ajoutent des règles à celles par lesquelles le législateur a organisé la procédure de CRPC et ne peuvent être regardées comme ayant simplement déterminé les modalités d’application des règles fixées en la matière par le législateur » ;
- concernant le droit de reproduction des pièces du dossier par l’avocat dans le cadre de l’information judiciaire: « il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu, s’agissant des procédures concernées, limiter le droit des avocats à une simple consultation du dossier, sans leur permettre d’en obtenir une copie ni à fortiori d’en réaliser par eux-mêmes une reproduction intégrale ou partielle dans le cadre de cette consultation (…) ont fixé des règles nouvelles et ne peuvent être regardées comme ayant simplement déterminé les modalités des règles déjà fixées en ce domaine par le législateur ».
L’USM ne peut que se réjouir du rappel de ces règles fondamentales et nécessaires à l’Etat de droit, qui ne sont que la déclinaison de la séparation des pouvoirs.
L’USM continuera d’agir contre toute tentative de l’exécutif d’empiéter sur le domaine législatif ou d’infléchir la hiérarchie des normes, tentatives qui pourraient se multiplier face à une assemblée nationale sans majorité.
C’est ainsi que l’USM a, la semaine dernière, attaqué la circulaire interministérielle « règlementaire » ajoutant aux dispositions législatives et réglementaires en matière d’extractions judiciaires (ici).