Le Gosse, de Véronique Olmi

17 juin 2024

Le conseil lecture de Cécile Mamelin

De nombreux livres ont été écrits pour parler des bagnes d’enfants ou plus généralement de la façon dont on « traitait » les enfants dits à problèmes dans les temps anciens (ou pas tant que cela finalement !). En voici un qui vous touchera au cœur et à l’âme : « Le gosse » de Véronique Olmi, paru au Livre de Poche en mai 2023. Attention, les larmes risquent de couler !

Au sortir de la 1ère guerre mondiale, Joseph, orphelin de père, vit ses premières années d’enfance plutôt douces et heureuses dans un quartier pauvre de la Bastille. Lorsque sa mère décède et que sa grand-mère (la seule parente à s’occuper de lui) est envoyée peu après dans un asile, Joseph devient à 8 ans « pupille de l’Assistance publique », une administration censée le protéger, mais plus cruelle que bienveillante, entre « matons » sans filtre et sans compassion et des enfants abîmés et violents entre eux, grandissant loin de toute affection. De la prison pour enfants à la colonie pénitentiaire de Mettray (soit de Charybde en Scylla) – comme nous l’apprend Wikipédia, c’est un établissement qui, « en dépit de ses principes fondateurs idéalistes, à savoir éduquer et rééduquer les jeunes délinquants par le travail de la terre, est considéré comme l’ancêtre des bagnes pour enfants » – l’enfance de Joseph devient alors une enfance saccagée où volent en éclats sa joie et son innocence. La force de cet enfant, les rencontres dues au hasard, l’amitié dans l’adversité avec certains pensionnaires et enfin la découverte de la musique lui permettront de dépasser le pire et d’accéder bon an mal an au statut d’adulte.

Véronique Olmi s’est documentée pour nous raconter la vie dans ce véritable bagne pour enfants. Dans son livre « le Miracle de la rose », Jean Genet, qui y a séjourné, décrivait notamment ce que fut sa vie là-bas, expliquant que « chaque paysan touchant une prime de cinquante francs par colon évadé qu’il ramenait, c’est une véritable chasse à l’enfant, avec fourches, fusils et chiens qui se livrait jour et nuit dans la campagne de Mettray » !

Dans ce roman, qui court jusqu’en 1936, période du Front populaire, la romancière montre une fois encore combien le milieu social et la date de naissance façonnent un destin. Pour Joseph, le « redressement » et le travail à outrance remplacent l’éducation et la culture, sans même parler de l’affection qui est inexistante.  

L’écriture intense et empathique de Véronique Olmi épouse le regard de ce gamin tendre et courageux confronté à la violence du monde adulte. Un roman déchirant et révolté, un des plus beaux textes sur l’enfance à l’aube du siècle dernier et sur la résilience et l’espoir.

Vous ne le quitterez pas jusqu’à la dernière ligne, et vous ferez bien car des surprises vous y attendent. Spoiler est interdit 😊