Le conseil lecture d’Alexandra Vaillant : Dans les yeux du Procureur, Chroniques de la justice ordinaire, de Jeanne Quilfen ; plongez dans la justice du quotidien !
Notre collègue s’est fait connaître sur Twitter sous le pseudonyme de SirYesSir29, en y partageant des moments du temps judiciaire pénal (présentation devant le Procureur, arrivée dans le box du prévenu, attitude de la partie civile ou de la victime lors des débats, sens des réquisitions, quelle peine requérir et pourquoi …). Avec des mots simples et justes, elle a su rallier quelques 73 618 abonnés à son compte.
A la demande de plusieurs followers, elle a publié en septembre 2022, sous le pseudonyme de Jeanne Quilfen, aux éditions Hugo Doc, un ouvrage reprenant ces instants d’audience et décrivant ses débuts en tant que jeune substitut et juge d’instruction (elle a exercé ces deux fonctions).
Alors pourquoi, me direz-vous, quand votre pile de livres à lire dépasse déjà des sommets quasi himalayens, se plonger dans le quotidien de notre collègue ? Eh bien parce que Sir Yes Sir a le talent de vous tenir en haleine tel un Harlan Coben ou une Camilla Lackberg, à chacune de ses courtes anecdotes. Vous connaissez évidemment la procédure et le déroulé de l’enquête mais vous avez envie malgré tout de savoir pourquoi ce retraité a tué sa femme après des années de vie commune paisible, comment cette femme a pu accuser son compagnon à tort de viol, si ce mineur multirécidiviste va enfin adhérer à l’une des mesures proposées, et si cette jeune femme pourra un jour se reconstruire après avoir subi des violences sexuelles incestueuses pendant des années… C’est la justice de tous les jours, notre justice, celle qui ne fait que rarement la une des médias nationaux, faute de protagonistes connus ou d’arrière-fond politico-financier, mais qui est la soupape de notre Etat de droit.
Avec pédagogie et humanité, Sir Yes Sir a su expliquer le métier de magistrat, en prise avec toutes les facettes de la société, en interaction permanente avec ses partenaires, confronté bien souvent à l’horreur, plus rarement à la solidarité, doutant parfois, luttant toujours contre le peu de moyens mis à sa disposition.
Vous ne changerez pas vos pratiques après cette lecture, mais vous vous interrogerez peut-être sur certains sujets ou contentieux. Vous vous demanderez sans nul doute : et moi, qu’aurais-je fait à sa place ? En gardant à l’esprit, comme notre collègue, que l’humain demeure le socle de nos pratiques judiciaires.